Le monde selon Albert Einstein 👴🏽

Albert Einstein est connu de tous. Mais que savons-nous réellement de sa vision du monde ? Il est toujours intéressant d’écouter ce que l’un des cerveaux les plus brillants a à dire. Toute sa vie, Einstein s’est battu pour ses idéaux : le bien, le beau, le vrai. Sans concession. A travers de nombreuses lettres et écrits qu’il nous a laissé, il nous explique sa vision du monde avec toujours la volonté de chercher le bien de l’humanité, en toile de fond.

Humilité

Pour Einstein, juger la qualité d’un homme revient à répondre à la question suivante : “à quel degré et dans quel but s’est-il libéré de son moi intérieur ?”
Car la liberté ne peut pas exister. Aucun homme n’est libre, il est entièrement façonné par son environnement, son éducation et par d’innombrables pressions étrangères.

“L’homme peut certes faire ce qu’il veut, mais il ne peut pas vouloir ce qu’il veut” Schopenhauer

A quel point l’homme est-il conscient de cet état ? S’il y a bien une chose à retenir de la vie d’Einstein est son incroyable humilité. Il est parfaitement conscient qu’il ne sait pas grand chose du monde, que ce qu’il pense n’est pas la seule conclusion de sa pensée et de son raisonnement logique. Il sait qu’il n’est rien dans l’immensité du monde et paradoxalement, c’est en ce sens là qu’il est l’un des hommes les plus libres. Quand on veut se défaire de chaînes qui nous retiennent prisonniers, la première étape indispensable est de se rendre compte de l’existence de ces chaînes. C’est seulement à partir de ce moment là que l’on peut espérer détendre l’étreinte.
Nous dépendons tous intégralement de l’existence des autres. Ce que je sais et pense, je le dois à l’Homme. Pour communiquer, j’utilise un langage crée de toute pièce par l’Homme. Comment penser sans langage ? Que serait un homme totalement abandonné à la naissance, sans aucune possibilité de communiquer ? Sans la parole, la condition humaine serait celle de l’animal.

Ainsi, il est parfaitement impossible d’acquérir des connaissances certaines sur quoi que ce soit. Einstein reprend la thèse de Hume quand il disait que :

“L’empirique dans la connaissance n’est jamais certain.” Hume

Les concepts de notre pensée et notre langage sont des pures créations de l’esprit. A partir de ce moment là, il nous est mécaniquement impossible de maîtriser le monde conceptuel, le monde de l’hypothétique : le monde de la connaissance ultime (s’il existe). La connaissance que nous avons des objets est forcément une transformation de la matière brute par nos sens. Le moindre de nos raisonnements est donc forcément faussé puisque les hypothèses de base que nous prenons le sont également.

Le progrès

Le progrès est uniquement le fait d’individus solitaires, comme l’était Einstein. Pour pouvoir créer des nouvelles choses pour la communauté, la personnalité créatrice doit être indépendante du pouvoir, de la politique et plus généralement de sa condition matérielle. L’inventeur qui crée et qui change le monde est forcément un inventeur qui y passe sa vie, animé par ce seul et unique but. Le reste ne doit pas compter.

Einstein explique ainsi la diminution du nombre de génies par la mécanisation de la société. L’organisation mécanique, la spécialisation des tâches (nous sommes en 1930) s’est progressivement substituée à l’homme novateur, qui invente et révolutionne son domaine.

Culture morale

Einstein critique vivement cette mécanisation et prône, au contraire, l’éducation d’une culture morale. La prolifération des échanges matérialistes paralyse les relations humaines. Une éducation trop concrète, trop spécifique est un immense danger pour les Hommes et les valeurs morales.

“Il ne suffit pas d’apprendre à l’homme une spécialité. Car il devient ainsi une machine utilisable mais non une personnalité. Il importe qu’il acquiert un sentiment de ce qui vaut la peine d’être entrepris, de ce qui est beau, moralement droit” Albert Einstein

Un excès de compétition et de spécialisation des individus (comme le système scolaire peut le faire actuellement par exemple) entraîne un assainissement de l’esprit et supprime toute véritable conscience chez les individus. Les individus n’étant plus capable de raisonner, toute possibilité de progrès fondamental (découvertes scientifiques, économiques, intellectuelles…) disparaît également.
Pour Einstein, l’unique but de l’éducation est de viser à parfaire l’esprit critique et l’intelligence du jeune homme. Elle doit lui donner les clefs pour faire ses propres choix en pleine conscience et connaissance des choses.

Politique et pacifisme

La paix est l’un des thèmes de réflexion privilégié d’Albert Einstein. C’est un thème plus que jamais d’actualité dans le contexte de l’époque : 1930, l’entre deux guerre, le Traité de Versailles et la montée du National-Socialisme en Allemagne. Einstein voit la résurgence d’un nouveau climat de forte tension. Prenant la position d’un penseur indépendant agissant pour le bien de l’Humanité, il tente d’œuvrer pour la paix. Même si l’histoire nous a montré que ses efforts seront vains, ses prises de positions restent toujours très pertinentes.

L’armement

L’un des principaux obstacles à la paix dans le monde réside dans les lobbys et les groupes industriels fabricants d’armes. De par leurs intérêts économiques, ces groupes s’opposent systématiquement au règlement des conflits de manière pacifique. Sans désarmement massif de tous les pays, il est impossible d’établir une paix durable.
Cela semble paradoxal quand on repense à la plus grande invention réalisée par Albert Einstein, à savoir la bombe atomique. Mais Einstein explique que si ce n’était pas lui qui l’avait mise au point, elle l’aurait été par les Allemands. La bombe atomique en possession des Nazis et l’anéantissement de l’Humanité n’aurait pas été très loin.
Aujourd’hui, la course au profit immédiat et individuel passe avant toute idée de bien collectif et de long terme. Les groupes industriels militaires créent de l’emploi et des revenus à court terme. Mais à long terme ils menacent la paix et l’avenir de l’Humanité.

Le service militaire

Einstein est farouchement opposé à l’idée d’un service militaire. Les Etats sont des pures inventions de l’Homme. Et la tâche principale d’un Etat est de protéger les individus et d’agir dans leurs intérêts. Cette relation est bafouée à partir du moment où il contraint sa population au service militaire et à la guerre. Nous devenons des esclaves ayant pour seul but d’anéantir d’autres hommes, au nom d’un nationalisme crée de toute pièce.
Le service militaire est une mesure destinée à être capable de riposter en cas de guerre, cela semble noble au premier au coup d’œil. Mais c’est ici que se situe la principale difficulté de la paix selon Einstein : déterminer sa politique sur l’éventualité d’un futur conflit est totalement contradictoire avec la paix. Tant que la possibilité de la guerre ne sera pas totalement supprimée, les nations continueront de se militariser.

Les nations

“Le plus grand obstacle à l’ordre international (et la paix dans le monde) consiste dans ce nationalisme exacerbé, dénommé illusoirement et sympathiquement patriotisme. En effet, dans les cent cinquante dernières années cette divinité a acquis une puissance criminelle angoissante et extraordinaire.” Albert Einstein

Les nations ont tout intérêt à exalter chez les citoyens un sentiment de nationalisme, de fierté patriotique. De cette façon, il leur est beaucoup plus simple de pousser les gens à accepter un service militaire en leur vantant la défense de leur Etat, de leur patrie.
Pour Einstein, l’établissement d’une paix durable demande obligatoirement des sacrifices et un certain renoncement aux nations. L’objectif étant de faire émerger une conscience internationale, commune : une conscience humaine qui rassemblerait tous les hommes de la planète autour des mêmes valeurs et idéaux.

Créer une organisation supra-nationale

Pour matérialiser cette conscience internationale, Einstein juge indispensable la création d’une instance indépendante des Etats. Celle-ci sera unanimement reconnue par l’ensemble des Etats existants et ses décisions/sanctions (principalement de types économiques) seront appliquées sans discussion.

“Seule une organisation supranationale peut nous protéger, si elle dispose d’un pouvoir exécutif suffisant” Albert Einstein

En plus de garantir la paix, cette institution aura également pour rôle de planifier et réglementer le progrès technique pour qu’il soit bénéfique à l’humanité et non qu’il la détruise. Le libre jeu des forces économiques et la volonté de domination des individus et des Etats est contraire à la volonté de paix. C’est pourquoi une régulation mondiale est indispensable selon Einstein.

Cette institution fonctionnerait ainsi :

- Chaque pays se soumet à toute décision de la Cour international d’arbitrage.

- Chaque pays, en accord avec tous les autres Etats membres de la Société des Nations et au prix de toutes leurs ressources économiques et militaires, intervient contre tout Etat qui briserait la paix ou qui rejetterait une décision internationale dictée par l’intérêt de la paix mondiale.

Comment obtenir la paix ?

En résumé :

“De simples conventions sur les réductions d’armement ne procurent nullement la sécurité. La Cour d’Arbitrage obligatoire doit disposer d’un exécutif garanti par tous les États participants. Il [l’organisme supranational] interviendrait par sanction économique et militaire contre l’État briseur de paix. Le service militaire obligatoire doit être combattu puisqu’il constitue le foyer principal d’un nationalisme morbide. Les objecteurs de conscience doivent donc tout particulièrement être protégés internationalement.” Albert Einstein, en 1932.

La recherche de la paix est une quête à la vie ou à la mort. C’est tout ou rien, il ne doit pas y avoir de demi-mesure. Après l’échec de la Société des Nations, mise en place dans le traité de Versailles en 1919, qui n’empêchera pas la seconde Guerre Mondiale, un organisme beaucoup plus ambitieux sera crée en 1945 selon certains des préceptes d’Einstein : l’Organisation des Nations Unies.

“La paix ne s’obtiendra qu’en dépassant l’égoïsme de son pays et de sa classe” Albert Einstein

Source :

“Comment je vois le monde” — Albert Einstein